samedi 5 juillet 2014

La Russie - Irkutsk et île d'Olkhon






Arrivés à Irkutsk, nous devons nous lancer immédiatement dans notre première demande de visa pendant le voyage. Cette autorisation d'entrer sur le territoire de la Mongolie ne semble pas bien difficile à obtenir, mais nous sommes embêtés parce que les informations sur internet à propos de l'ambassade sont plus qu'insuffisantes, et en plus, elles se contredisent d'une fois sur l'autre.

Après être entrés en pleine salle de répétition du théâtre philharmonique d'Irkutsk pour demander notre chemin, nous voilà à l'ambassade, ouverte, et prête à nous servir. Ouf !

Demande faite, nous filons dare-dare à la station de bus pour essayer d'en attraper un et filer directement sur l'île d'Olkhon.
Malheureusement, impossible d'avoir des infos cohérentes, ni auprès des guichets, ni des autres chauffeurs de bus. Nous décidons alors de passer voir si l'office de tourisme pourrait nous proposer une solution.

Arrivés là bas, nous comprenons deux choses : nous arrivons un mois avant le début de la saison touristique, et donc un mois avant la mise en place des moyens publics pour se rendre sur l'île ; et il est impossible de demander un engagement aux personnes qui s'occupent des trajets entre Irkutsk et l'île.
Et comble de malchance, l'aéroglisseur qui s'occupe normalement de relier les deux côtes pour rejoindre l'île s'est cassé ce matin même.
Il va falloir faire en conséquence : nous finissons par réussir à récupérer un numéro de téléphone de matrouchka (mini bus russe), et nous joignons nos hôtes couchsurfing sur Irkutsk pour l'informer de notre arrivée imminente.
Nous passons le reste de la journée à visiter doucement la ville, et nous rejoignons Maria et son mari en début de soirée après nous être perdus plus d'une heure dans le dédale des vieux immeubles soviétiques au bord de la rivière Irkut.
Le soir, nous réussissons enfin à avoir une réponse positive pour se rendre sur l'île le lendemain matin. Quand à l'aéroglisseur, il est finalement remplacé par un ferry brise glace.

A 8h pétante, nous sommes de retour à la gare routière, épuisés par la longue marche avec les sacs à dos.

On retrouve nos copains taximans de la veille, cette fois ils n'essaient plus de nous vendre le trajet à tout prix, et nous filent un sérieux coup de main pour trouver notre chauffeur qui s'est bien caché !
Nous ne partirons pas avant 11h, le mini bus est enfin plein à craquer. A peine sortis d'Irkutsk, nous retrouvons les grandes plaines à l'herbe rase, et voilà nos premiers troupeaux en liberté ! D'abord des moutons, puis des chevaux, avec des petits poulains !! Pendant que Damien dort, j'assiste tout excitée au défilement du paysage. Ma hâte d'arriver au plus grand lac de la planète grandit kilomètre après kilomètre. Une prof d'anglais qui travaille sur l'île depuis quelques années nous explique comment elle est tombée amoureuse de ce lieu, pour décider d'y vivre à plein temps...
Il fait beau, la route est bonne, aussi nous arrivons rapidement au lieu de pause déjeuner. On y perdra deux passagers. Plus à l'aise, il faut pas rêver, nous en attrapons 5 de plus sur la route, et encore 2 un peu plus loin. Les enfants sur les genoux ou les genoux sous le mentons, nous voilà enfin arrivés au ferry, et au lac encore gelé :D

On monte dans le bateau, et c'est parti pour 20 minutes de traversée sous le chant de la glace. Que c'est beau !







Arrivés sur l'île, il reste encore deux heures de piste pour rejoindre Khuzhir, le principal village de l'île, où nous attend notre prochain hôte couchsurfing.
Nous arrivons chez Sergey alors que l'après-midi est déjà bien entamée. Et le voilà devant sa maison en train de discuter avec un ami. Il nous accueille avec un grand sourire. Nous voilà ici chez nous, dans un cabanons de 3 mètres sur 2, sans eau courante ni fausse septique, mais avec une petite table surmontée par une fenêtre donnant sur le village. Tout ça n'est pas dénué de charme, un vrai petit nid de paix et d'amour, exactement ce dont nous avions besoin après ces quasi deux mois de course effrénée à travers le continent.


Le soleil décline et il est juste temps de partir visiter le village. Il n'y a pas de goudron sur l'île ; elle est ensoleillé plus de 90% de l'année, l'air y est heureusement humidifié par le lac, mais les pistes libèrent une poussière prenant la gorge et séchant les yeux et le nez. Au port, les bateaux sont encore prisonniers de la glace,










et nous filons marcher dessus, trop heureux d'arriver avant la fonte. Plusieurs vieux bâtiments en pierre ont été détruits puis laissés tels quels, les vieilles carcasses de voitures, les rues vides, les échoppes fermées et les places de marché défoncées par l'hiver donnent à Khuzhir un air de village fantôme.
La plupart des habitations sont en bois, seuls les magasins et l'église sont construits en dur. Eclat de gaieté, la petite église orthodoxe de Sergey perché au dessus du village donne une touche vivante à l'ensemble. Notre cabanon est juste à côté, chaleureux repère pour la semaine à venir.

Ce soir, les orthodoxes fêtent Pâques, et Sergey est en pleine préparation !

Difficile de l'aider pour cette fête religieuse, nous nous lançons donc dans la préparation de son jardin. A nous bêche, râteau, pioche et seau. Je plante salade, radis et aneth pendant que Damien prépare le terrain pour les navets et carottes.







Finis juste à temps pour le coucher de soleil, nous partons jeter un dernier regard au lac avant de rentrer dans notre petit nid préparer la soirée.





Les toilettes sèches sont perchées encore plus haut sur la butte. D'ici, on voit le port, les jeux pour enfants, le lac. Un tableau tel qu'il m'a été impossible de résister à la balade matinale, après avoir été réveillée par les cloches.

Assise entre les racines d'un vieil arbre au bord de la falaise j'écoute le lac me chanter sa complainte, prisonnier d'une couche de glace qui s'affine à vue d’œil. Mais la fonte n'empêche pas les pêcheurs de partir loin sur l'immensité gelée, afin de capturer quelques omouls bien frais. Entendre la glace craquer sous leur pas et leur traîneau plein à craquer illustrent bien le danger de la pêche à cette époque.

Mais ces hommes connaissent le lac comme leur poche, ils en acceptent les humeurs, toutes les années des hommes disparaissent sous l'étendue gelée. Ici la nature ne se dompte pas, on vit avec.
Je reste un long moment ainsi à contempler le lac, en excellente condition pour entamer Dans les forêts de Sibérie -journal de bord de l'hermitage de Sylvain Tesson au bord du lac Baîkal- .

Damien finit par me rejoindre, et nous passons une journée à apprécier le calme et la beauté du lieu, ainsi que les excellentes pâtisseries d'Anastasia, la femme de Sergueï, préparées pour Pâques.

Derrière le village, se trouvent une petite crique, le grand rocher à chamans, et plus loin une immense plage de sable blanc.


Les chamans se cachent sur l'île, pour eux le lac est comme un animal, vivant et respirant, partageant son énergie avec ses occupants.
Comment pourrions-nous les contredire ?!
Est-ce que c'est l'idée de se poser au même endroit qui nous amène ce ressenti de plénitude ?
Difficile à dire mais on se sent sacrément bien ici. On prête même à l'île la magie de soigner et d'apporter fécondité. Les histoires de plusieurs habitants de l'île appuient ces faits, et d'ailleurs, de nombreux médecins y envoient leurs patients difficiles pour une cure de plusieurs années. 





Le lendemain, nous partons pour une balade jusqu'au prochain village, à environ 8 km au nord du cabanon. Nous décidons de passer par la glace pour l'allée. Pas bien loin de la côte, non non, mais la sensation de marcher sur la glace est grisante !


Nous rencontrons peu d'animaux, mais beaucoup de carcasses. D'une crique à l'autre, nous arrivons finalement à destination pour trouver un village encore plus morbide que Khuzhir.
Que des vaches dans les rues, des bouses qui sèchent de partout, des paraboles qui pendent aux toits brinquebalants ou carrément écroulés.

 Et sur le côté de la route, mais à quoi correspondent ces carcasses rouillées !? Peut-être bien des bagnats : plus qu'à rajouter une bâche sur le dessus et voilà une chambre de sudation ! On en aperçoit plusieurs au large de la côte : idéalement positionnés sur le lac, il n'y a plus qu'à transpirer et se baigner dans l'eau glacée.

Sur le chemin du retour, nous longeons de longues barrières qui abritent de nouveaux complexes hôteliers, des camps de vacances,... Et nous tombons sur l'ancienne piste d'atterrissage pour le petit avion qui faisait la navette entre l'île et Irkutsk à l'époque soviétique.
Quelques kilomètres avant d'arriver, une voiture nous prend en stop après nous avoir fait une sacré frayeur en essayant de nous écraser. Ça tombe bien, ça commençait à tirer sur la cheville !




En arrivant, je me lance dans une symphonie dissonante avec les cloches de l'église : pendant la semaine sainte, tous le monde est invité à venir tirer gaiement sur les cordelettes et envahir le village d'une musique mélodieuse (ou pas). C'est à ce moment que Sergey nous fait la bonne surprise de trois omouls préparés par Anastasia : farce de curry et herbes, nous nous sommes régalés !

Le lendemain, c'est repos pour la cheville de Damien. Nous partons pour l'auberge de Nikita pour tenter de programmer une virée dans le nord de l'île avec d'autres touristes. Mais nous avons loupé notre jour...
Alors on reste autour du cabanon, on fait un peu le ménage, et on file un coup de main pour nettoyer un gros bidon qui va aider à conserver l'eau amenée deux fois par semaine par un camion citerne.
Dans l'après midi, trois nouveaux couchsurfers arrivent et, oh surprise, ce sont des français : nos premiers sur la route!



Le jardin est aussi à la fête puisque Damien reprend la bêche, et je finis de nettoyer en brûlant les mauvaises herbes et en répartissant les cendres dans les bacs qui restent. Le labeur finit par dégénérer en jeux avec les enfants de Sergey. Il en profite pour nous montrer son église qui sent bon les épices. Les peintures à l'intérieur ont toutes été réalisées grâce à un couchsurfer qui se trouvait être peintre, et à qui la beauté de l'île a fait rallonger son séjour.



Le vent a beaucoup soufflé cette nuit, il a amené un froid qui me cloue sous les couvertures jusqu'à ce que Damien débarque dans le cabanon en criant que j'ai failli faire brûler la maison...
J'enfile vite une veste et trouve Sergey auprès de sa barrière, en train de scier et dévisser les planches brûlées. Sueur froide dans le dos, le vent violent a attisé mes cendres et a porté le feu au planches de la barrière, à seulement quelques mètres de leur maison en bois... C'est un voisin qui a porté l'alerte en voyant les flammes alors qu'il rentrait de chez sa petite amie en pleine nuit.

Nous prenons aussitôt le relais et tentons de redonner à la barrière son allure d'origine. J'ai beaucoup de difficulté à avaler le risque que je viens de faire courir à cette famille par manque de jugeote face à la force du vent. Mais Sergey et Anastasia m'assurent que je n'ai pas à être mal à l'aise et qu'il n'y a plus qu'à remercier ce voisin et sa petite amie d'avoir sonné l'alerte. Leur paroles réconfortantes ainsi que l'excellent mors m'apportent un peu de paix, et je passe l'après-midi à cuisiner un pain d'épice avec les enfants et Anastasia et grignoter des fruits confits et de la salade olivia (tellement meilleure que celle du restaurant!!).

Nous passons aussi la fin de journée avec Célia, Anne-Sophie, Florent ainsi que deux autres français logeant chez Nikita : Carole et Jean-Marie. C'est soirée omoul chez Nikita, qui dégénère en soirée finissagedevodkaavantlepassagedelafrontière dans la grande cabane à couchsurfing, chez Sergey.


Sacrée soirée pendant laquelle la neige s'est mise à tombée ! Seulement la deuxième fois de l'année pour l'île, et il y en a un sacré paquet !

Le lendemain, le spectre de la barrière enflammée est toujours là, mais pas de problème de mal de tête vodka ! Tout est blanc dehors, Sergey nous accueille à coups de boules de neige avec ses ptits bouts, c'est la fête !












Célia et Anne-so repartent pour Irkutsk cet après midi, nous les accompagnons puis retournons chez Sergey jouer l'après midi avec les enfants.
Je fait un tour au marché et ravie, trouve quatre poissons frais autres que des omouls aux dires de la marchande. J'arrive victorieuse au cabanon, quand Sergey m'annonce qu'il s'agit de hareng salé. Bon tant pis, on passe la soirée à les vider, les trier, c'est très bon, et parfait comme repas d'appoint pendant une coinche avec Flo et Carole ! Pour cette nuit, nous délocalisons dans la grande cabane : notre cabanon prend l'eau avec toute cette neige et ça tombe pile sur nos têtes.

Le lendemain, Sergey nous propose d'aller faire un tour dans la forêt avec ses enfants, et un couple de russes arrivant tout juste du pôle nord. Dans les bois, la journée est belle et la neige commence à fondre. Les essais de luge ne sont pas concluants, aussi nous montons jusqu'à un point de vue splendide, nous permettant de passer au dessus de la nappe de brouillard qui taquine Khuzhir.

Le loup !!
Et la marmotte :)













Et enfin arrive le jour tant attendu de l'excursion dans le nord de l'île. Nous avions été obligé de le décaler à cause de la neige. Mais ce matin, on n'y voit pas à deux mètres tellement que le brouillard est épais... Heureusement, une heure de route au nord et l'horizon apparaît, sur un lac qui change à vue d’œil. Nous cheminons difficilement jusqu'au cap, où l'horizon se perd dans l'immensité du lac. La rive Est, enfin ! Derrière la grande mer, se détaille la Buriatie. Avec une population à dominance mongole : un avant goût de la prochaine étape !?











Puis voilà le jour du départ... on traîne à faire nos sac et ranger, faire le ménage... Tellement qu'on se retrouve en retard, à peine le temps de faire une bise à Anastasia, Sergey introuvable, il faut filer bon train pour attraper la navette nous ramenant au ferry, qui aura finalement une heure de retard... Au final, les « au revoir » sont moins difficiles comme ça. Il est tellement difficile de quitter ce petit coin de paradis que nous sommes convaincus d'y revenir très vite !



En arrivant à Irkutsk, nous retrouvons nos couchsurfers ainsi que Flo, Carole et Jean-Marie, et nous partons nous régaler dans un restaurant où nous avons l'opportunité de goûter à quelques unes des dernières spécialités russes comme la liqueur de radis noir!





Le lendemain, la visite d'Irkutsk est fortement compromise par de vilaines giboulées de neige alors que la veille nous nous baladions en débardeur... Partis se mettre au chaud dans un café cocoon que nous avions découvert à notre dernier passage, nous programmons notre arrivée en Mongolie qui doit se dérouler deux jours après. Une mauvaise nouvelle est arrivée : notre hôte à Oulan baator est malade et ne pourra pas nous recevoir... Et puis il nous reste encore à trouver des sous-bocs avec écriture cyrillique pour la collection de Damien ! C'est ainsi que nous faisons la connaissance de deux jeunes russes qui nous mènent de bars en bars pour tenter de trouver le graal.
Mais après une heure de recherches sans succès, il est manifeste qu'il n'existe pas de sous-bocs fabrication Russie. Nous leur expliquons alors que nous devons interrompre ici cette rencontre très sympa malgré l'échec et la promesse d'une éventuelle très bonne soirée à venir. Déçus, ils décident alors de nous écrire un ptit mot sur des sous-bocs de bières russes que nous avons en notre possession : un souvenir bien plus précieux !!


Il est grand temps de rejoindre Maria et son mari pour un dernier salut et filer à la gare attraper notre trans-mongolien. Au revoir la Russie !






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